C’est un cérémonial que je ne loupe jamais. Le 2/04 de chaque année je pense bleu, je colle ta photo sur mon mur et j’écris quelques mots. Certains diront que ça ne sert à rien, parce que les troubles du spectre autistique se vivent au quotidien et pas juste une journée. C’est vrai. Mais c’est un jour où l’on peut changer les idées reçues et ça, ça compte. L’autisme que je connais le mieux, c’est le tien. Toi, ma fée Louison, qui me comble de bonheur depuis bientôt 15 ans.

Après le diagnostic, avec ton père on a entendu beaucoup de choses. Du mot cru à la parole compatissante, des maladresses aux témoignages de soutien, ou encore des beaux discours hypocrites aux silences éloquents, nos oreilles ont parfois saigné de ce trop-plein de chansons qui ne te ressemblaient pas.

Parce que sans qu’on ne te demande rien, tu as su prouver que tu es bien plus que cette étiquette que la société te colle à la peau. Ta force de caractère, ta volonté sans faille, ta rage d’affirmer, à tous, que tu peux et que tu dois avoir ta place, sont autant de leçons acquises à travers toi.

Combien de fois a-t-il été dit que tu n’y arriverais pas ? Que ce n’était pas pour toi ? Alors ensemble, nous sommes devenus ce petit escadron qui a la puissance des plus grandes armées. On en a gagné des batailles, à faire mentir les bien-pensants, à déjouer les pronostics et dépasser certains objectifs.

Bien sûr, se battre use et implique de nombreux sacrifices. Mais tu en vaux la peine. Tes sourires si purs sont notre plus belle récompense. À tes côtés nous avons fait des rencontres merveilleuses. Des gens qui comme toi ne rentrent pas dans le moule mais forcent le respect, d’autres encore qui ont le cœur si gros, que par moments, j’en chiale de reconnaissance. Je pense surtout à ton AVS Sylvie, véritable ange gardien placé sur ta route. Je ne pouvais rêver mieux pour t’accompagner dans ce parcours scolaire semé d’embûches.

Parfois on me plaint, on m’admire de ne jamais baisser les bras. Certains assurent qu’à ma place ils ne pourraient pas et s’étonnent que je puisse croire en toi. Je ne comprends pas. C’est si facile de t’aimer. Evident même, de vouloir le meilleur pour notre enfant. Mais j’ai appris à laisser jaser et ne plus écouter. Ton parcours se passe de commentaires.

Quand d’autres ne retiennent que tes longs monologues solitaires, tes blagues maladroites, tes stéréotypies, tes gestes mal coordonnés et tes difficultés, moi c’est toi qui m’éblouis. Toi et tes je t’aime pudiques qui valent mille déclarations grandiloquentes. Toi et ta simplicité à recevoir les autres pour ce qu’ils sont et non pour leur statut ou leur garde- robe. Toi et ta douceur qui surprend toujours. Ta voix affirmée qui chante faux, mais capte toute l’attention. Ton regard si profond qu’il en est déstabilisant. Toi, toi, toi juste toi.

Tu nous fais grandir, parce que c’est une chance de t’avoir pour fille et ce, malgré la montagne d’obstacles à franchir. Ton frère et ta sœur le savent. Si justes et si sensibles, tu révèles le plus beau chez eux. Tu nous rends meilleurs ma fée et ça, ce n’est pas écrit dans les livres qui parlent des troubles du spectre autistique. On le vit, tout simplement.

Voilà, pour moi c’est ça l’autisme et je suis si fière d’être ta maman.

Géraldine.

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