Pourquoi est-il important de parler des féminicides ?
Les féminicides : paroxysme des violences de genre
Le thème des féminicides est en toile de fond de mon 2e roman Dis-lui au revoir. C’est un phénomène sur lequel je m’interroge. Il me perturbe et me glace du fait de toute l’horreur qu’il représente et de son caractère systémique.
Si je l’explore un peu plus en détails dans cet article, c’est parce qu’il me tient simplement à cœur de te parler de ce problème qui détruit tant de vies de femmes, ainsi que celles de leurs proches. Car ne pas parler des crimes sexistes, serait comme nier l’existence d’un problème de société majeur qui touche des femmes du monde entier.
Définition et origines de «féminicides»
Un féminicide est le meurtre perpétré à l’encontre d’une femme ou d’unefille en raison de son sexe. Tous les meurtres de femmes ne sont donc pas des féminicides. Ceux que l’on peut qualifier ainsi sont commis :
- dans la sphère intime par le conjoint ou l’ex-conjoint ;
- par un membre de la famille quand la femme a enfreint les codes d’honneur de celle dont elle issue ;
- par les parents à la naissance d’une fille, dans certains pays ;
- par la belle-famille dans les pays qui conservent la tradition de la dotlors des mariages ;
- par une personne extérieure à la famille proche (ami, connaissance, collègue, etc.).
Le terme est inventé en 1992 afin de mettre spécifiquement en exergue les assassinats de femmes, dans un ouvrage de sociologie américain. Jusque là, il n’existait que le mot “homicides”, qui ne permettait pas la distinction de genre. «Féminicide» est ensuite popularisé après les disparitions et assassinats particulièrement abominables dont sont victimes les mexicaines à partir de 1993.
de mortalité des femmes dans le monde.
contexte des meurtres de femmes
En France, il est important de préciser que les données analysées par le Ministère de l’intérieur, ne concernent que les féminicides conjugaux. Même si ces derniers représentent la majeure partie des cas, d’autres, que j’ai pu citer précédemment, ne sont pas traités pour le moment. D’après les statistiques, les auteurs d’homicides envers les femmes correspondent au profil suivant :
- homme en couple ;
- français ;
- âgé de 30 à 49 ans, ou de 70 ans et plus ;
- professionnellement inactif ;
- sous l’emprise de substances qui altèrent son discernement (drogues, alcool, etc.) dans plus de la moitié des cas.
Par ailleurs, les faits se déroulent principalement :
- au domicile conjugal ou de celui de l’un des partenaires ;
- après une dispute ou après l’annonce du désir de séparation exprimé par la femme ;
- à l’aide d’une arme à feu ou arme blanche.
Aux recensements des féminicides, s’ajoutent celles des enfants, bien souvent victimes collatérales de ces violences conjugales. En effet, ils peuvent se retrouver témoins de scènes traumatisantes, ou pire encore, succomber à leur tour sous les coups du parent infanticide.
Les féminicides sont-ils punis par la loi ?
Traitement des féminicides dans le monde
Comme je l’ai dit en introduction, le problème des féminicides s’étend malheureusement à l’ensemble de la planète. C’est pourquoi je ne peux donner que quelques exemples pour illustrer mon propos :
- Bien que le continent sud-américain soit classé en 2e position en terme de violences faites aux femmes, les féminicides sont inscrits dans le code pénal de 18 pays latino-américains ;
- au Canada, où les femmes autochtones sont les premières victimes de disparitions ou de meurtres, les féminicides ne sont pas pris en compte dans le droit pénal. Le gouvernement actuel tend à faire évoluer la situation, mais la justice est toujours jugée trop laxiste sur la question, surtout à l’égard des femmes de cultures amérindiennes ;
- En Europe, l’Espagne et l’Italie font figure de proue en la matière depuis qu’elles disposent respectivement depuis 2004 et 2013, d’un arsenal juridique spécifique. L’Espagne va même au-delà en créant, cette année 2022, des tribunaux spécialisés en violences de genre. La conséquence directe est la baisse progressive du taux d’homicides à l’encontre des femmes.
Traitement des féminicides en France
Il n’existe, pour l’heure, aucune loi portant sur le phénomène des féminicides en France. L’État est néanmoins signataire de la convention d’Istanbul, entrée en vigueur en 2014, qui vise à “protéger les femmes contre toutes formes de violences”. Une prise de conscience institutionnelle commence par ailleurs à émerger vis-à-vis des agressions liées au genre. Des mesures sont peu à peu mises en place avec notamment :
- l’ordonnance, par les juges, de la pose de bracelets électroniques sur les auteurs de violences non incarcérés ;
- la formation des forces de l’ordre à une meilleure prise en charge des victimes ;
- la possibilité de porter plainte en ligne sur la plateforme dépose ta plainte, sans avoir à se déplacer au commissariat ;
- le déploiement des téléphones «grave danger» destinées aux femmes victimes de violences.
lutter contre les violences faites aux femmes
Même si les statistiques des féminicides, ne serait-ce qu’en France, restent préoccupantes, pour ne pas dire désespérantes, certaines initiatives redonnent tout de même de l’espoir. Il est désormais possible de :
- Contacter le 3919 : n° gratuit destiné aux victimes de violences conjugales et à ceux qui en sont témoins, sous couvert d’anonymat ;
- de contacter des associations qui viennent en aide aux victimes de violences de genre, que recense le site du gouvernement : https://arretonslesviolences.gouv.fr/associations-de-lutte-contre-les-violences-sexistes-et-sexuelles ;
- de demander l’accès à des hébergements d’urgence, puis à des logements sociaux.
De plus, que tu sois toi-même victime ou simplement sensible à cette cause, tu peux :
- te documenter grâce aux ressources inestimables que recèle le web sur le sujet ;
- te former, grâce aux cours en visio du collectif Nous Toutes forme, pour apprendre à distinguer tous les types de violences sexistes, afin de t’en prémunir et d’assurer à ton tour la diffusion de l’information ;
- Prendre part aux manifestations régulièrement organisées contre les violences faites aux femmes, etc.
L’éducation et la sensibilisation aux problèmes de société restent, à mon avis, les armes les plus efficaces de lutte contre toutes les formes de violences.
Les féminicides sont un phénomène de société que l’on a du mal à éradiquer, tellement les mentalités, éduquées sur un modèle de domination masculine, peinent à évoluer. S’il est important d’en parler, c’est pour éviter de se résigner. Il est indispensable que les gens ouvrent les yeux et réalisent l’atrocité qu’un tel acte représente autant pour la victime que pour ses proches.
C’est l’intention qui m’a animée lorsque j’ai écrit mon roman Dis-lui au revoir, dans lequel j’aborde une des conséquences de ce type de tragédie. Parce que les dommages collatéraux sont énormes. Lorsqu’un féminicide est commis, ce sont plusieurs vies qui sont détruites, essentiellement celles des enfants de victimes qui payeront le tribut de la folie d’un homme durant toute leur vie.
Je t’invite à le lire si ce n’est pas déjà fait, ainsi qu’à me donner ton avis à son sujet ou celui de ce sujet en général, dans la rubrique «contact» de mon site.
Article rédigé en collaboration avec Séverine Blanchard, webrédactrice professionnelle